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Vittorio Sgarbi

Eugenio Mombelli, qui est un peintre informel, titre ses techniques mixtes d’huile, laque, collage et sable comme s’il s’agissait de sujets figuratifs. Ainsi, avec un Coucher de soleil sur le Carnaval de Venise, avec les Objets en mouvement ou des Fragments du soir, il semble faire allusion à une trame picturale explicitement reconnaissable.

Ainsi se dévoilent – peut-être – les étapes d’une évolution qui remonte à des débuts différents, à une origine qui n’a été - à juste titre - jamais reniée et qui retourne en surface avec l’apparence d’un récit où le visible est recouvert d’un tissu matiérique très beau.

Mombelli expose par ailleurs une peinture fragmentée dans laquelle il exalte des passages d’écriture, des citations et des vers à la manière des poètes visuels des années soixante-dix.

Ces graffitis sur fonds principalement noirs ne sont cependant pas assimilables à une intervention conceptuelle ; ils semblent plutôt demander à l’observateur de retenir un message, une trace de mémoire.

Il y a évidemment, dans cette manière d’opérer, l’étude de l’avant-garde américaine des années cinquante du siècle dernier, alors ce besoin de fixer le regard sur le langage comme forme lisible et sur des masses qui bougent dans l’espace pour créer des perspectives est absolument personnel.

Il s’agit de pulsations matiériques,

d’émersions d’effets chromatiques où le noir domine, où le blanc, par antithèse, joue un rôle éclairant, alors que le rouge et le jaune jouent des contrepoints inquiétants.

La matière picturale de ces oeuvres a des qualités vibrantes tout à fait inhabituelles et conduit le regard au-delà de la structure spatiale pour capturer le non-dit, qui est peut-être un objet, un paysage lointain couvert d’étalements qui dessinent des cailloutis, des fenêtres, des équilibres et des déséquilibres.

Un examen minutieux révèle que la construction repose sur l’effacement d’une figure, et moins par pulsion iconoclaste que pour une conservation paradoxale de la propre image à travers une couverture qui laisse entrevoir encore la trace.

La décoration d’inscriptions sur le côté expriment un énigmatique propos poétique, celui de donner corps – littéralement – à une vocation lyrique. Dans cette peinture, qui n’est réalisée qu’apparemment d’un seul jet, les masses exaspérées de couleur sont associées selon une étude approfondie des relations tonales et sous le signe d’une instinctivité très contrôlée.

Les formes informes de Mombelli se servent d’une palette préparée avec maestria où la qualité de la couleur se conjugue dans des modulations réglées par une méthode de composition qui ne laisse rien au hasard.

Ce sont des moments de peinture chaude, douce et d’ascendance nobles – du fait de certains liens avec le lyrisme informel d’un Marcel Tapié – où le travail sur l’épaisseur de la matière agit à travers une intervention qui se rapproche davantage du moulage que de l’étalement proprement dit.

La technique mixte épuise le potentiel de la non-forme qui finit par apparaître comme un système de signalisation propositif au pouvoir intense. Dans ce cas, la peinture incarne surtout l’émotion, celle que l’on éprouve en écoutant la musique atonale, faite de contrepoints parfois âpres et secs, parfois de moments détendus, mais de grande perfection expressive.

Quand à l’écriture, sa fonction de parachèvement réside précisément dans la linéarité qui interrompt la tonalité uniforme des fonds, comme une vibration ou un contre-chant.

La sensibilité matiérique de cet artiste, qui travaille substantiellement dans la transfiguration de la forme, reproduit sans violence un effacement du monde qui peut être lu comme l’affirmation de sa liberté par rapport aussi bien aux canons traditionnels de la représentation qu’aux exagérations idéologiques de trop d’avant-gardes.

extrait de “ I giudizi di Sgarbi ” Editoriale Giorgio Mondadori, Milan ( Avril 2005 )

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